Le peuple d'en bas de Jack London
Phébus Libretto – 250 pages
Traduit par François Positif
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Nous sommes au début du 20ème siècle, à l’époque de l’industrialisation, des usines crachant leurs fumées noires et de la misère omniprésente des ouvriers et des laissés pour compte de ces grandes villes. Alors jeune étudiant en sociologie, Jack London décide de se rendre à Londres et de faire connaissance avec ses gens, de prendre part à leurs vies afin de mieux les comprendre. Il nous délivre alors un témoignage à la fois effrayant et fascinant sur la vie que mènent ces gens. Bienvenue dans les Abysses.
Etude sociologique mais qui se lit comme un roman, London nous transporte dans ce monde inconnu, monde inconnu pour les gens aisés qu’il fréquente à l’époque. Gens aisés qu’il prend régulièrement à parti tout le long du livre. Le seul moyen pour s’émerger complètement dans ce monde et en faire totalement partie passe par les vêtements, London nous décrit parfaitement le changement de comportement des gens face à lui une fois vêtu de ses frusques, il devient alors quantité négligeable et par cela même ce fait accepter par le « petit peuple ».
L’entrée dans l‘East End est effrayante il semble, autant pour lui que pour nous, la misère est totale et elle est partout, les gens vivent dans des conditions impossibles «Les toits de ces taudis étaient recouverts d’immondices qui atteignaient par endroit deux bons pieds de hauteur et servaient de dépotoir aux habitants du deuxième et du troisième étage de la maison où nous nous trouvions. Je discernai des arêtes de poissons, des os, de la tripaille, des chiffons puants, de vieilles chaussures, de la vaisselle cassée, et toutes les déjections d’une porcherie à trois étages. » p 64.
Les passages les plus marquants sont ceux dans lesquels il s’intéresse aux sans abris et au fonctionnement des hospices et autres asiles de nuit. Les sans abris n’ont pas le droit de se coucher dans la rue la nuit par arrêté municipal, ils ne peuvent donc pas dormir la nuit, sans sommeil plus d’énergie pour trouver du travail, de même sans logement pas de repos, ni de soins donc pas de travail et sans travail pas de logement.
La plupart de ces gens ne vivent pas mais tentent de survivre, ils meurent très jeunes (âge moyen de vie 30 ans, p 201) et souffrent souvent de maladies dues à leurs mauvaises conditions de vie, saturnisme, maladies pulmonaires…
Je pense que cette lecture doit être faite en tant que récit (subjectif) d’un homme qui a vécu cette expérience et non comme une étude sociologique proprement dite, ce qui était pourtant je pense l’ambition de London de prime abord. Je dis cela car malgré sa volonté d’émailler son propos de citations d’autres « chercheurs » et d’inclure des tableaux de données, on ressent à travers notre lecture toute l’importance de ce qu’a pu ressentir l’auteur face à ce qu’il a vécu. Son ressenti est alors par définition subjectif.
Je pourrai encore parler longtemps de ce livre car il est très intéressant et instructif, la narration à la manière d’un roman nous empêche l’ennui, les chapitres découpent de façon claires et intelligentes les propos de London.
Le billet d'Isil qui m'a donné envie de lire ce livre.